La Fille qui écrit dans les musées

Une série consacrée à des mots posés sur des peintures. Je n’ai pas voulu poser des mots sur des tableaux ou des peintres particulièrement connus. Mais sur des artistes avec qui j’ai eu un lien, même ténu.

Le père de mes enfants a conclu sa carrière professionnelle en étant courtier d’art, après l’avoir débutée dans la recherche scientifique dans…le domaine des poussières. Oui, nous formons une tribu foutraque et arborescente. Sa belle sœur, par alliance de l’alliance, lol, tenait une belle galerie à Londres. Alexia Goethe’s Fine Arts. Galerie aujourd’hui disparue. Alexia se nomme bien Goethe. Ce n’est pas un pseudo. Elle a gardé ce nom prestigieux après son divorce. Son époux descendait en droite ligne du frère du poète qui, lui, n’eut aucune descendance. Ce fut une période un peu folle. Guy, mon conjoint fit des rencontres exceptionnelles ! De Jean d’Ormesson à Pierre Soulages en passant par Zao Wou Ki ! Pendant un temps, nous eûmes un dessin inédit de Van Gogh dans le coffre de la voiture ! Nous achetâmes tout le mobilier et trousseau de naissance de notre second fils avec la vente assez lucrative d’un Fernand Léger ! Et nous vîmes rembourser une dette avec un faux Childe Hassan ! De quoi écrire un livre entier ! Beaucoup des artistes présentés ici sont des artistes croisés à cette période.

Muriel Sinclair

Muriel Sinclair était une peintre avec une excellente cote qui appartenait à la Seconde École de Paris. Une sacrée bonne femme ! Elle ne buvait que du whisky. Ce qui ne l’empêcha pas d’atteindre un âge vénérable !  Elle et son compagnon Denis de Champeaux, dessinateur, écrivain et essayiste  – il est l’auteur d’une belle monographie sur Van Gogh – vivaient à Moret sur Loing où ils avaient acheté…l’ancien atelier d’Alfred Sisley ! Muriel était cette peintre délicate d’une abstraction sensible et suggestive. Alexia Goethe devint et est toujours la légataire de ses oeuvres et son exécutrice testamentaire. Denis fut le premier à partir. Après cela, Muriel « perdit la tête », elle s’enfonça dans son monde et ne revint jamais vraiment au nôtre jusqu’à son décès

Calum Fraser

Alors, Calum Fraser…c’est tout autre chose ! Nous n’avons pas connu ce peintre écossais éminemment talentueux et bien coté aussi. Pendant très longtemps, avec Guy, nous avons déambulé dans les villes, poussant la porte de toutes les galeries que nous croisions. Et, c’est dans une galerie parisienne, dans le Marais je crois, que nous avons rencontré Calum Fraser. Un peintre aux explorations multiples. Ses scènes humaines intimes sont bouleversantes. Et…il a peint Prague comme peu ! Surtout à cette époque où Prague était encore enfermée derrière le rideau de fer. Calum Fraser m’a donné envie de Prague ! Comme mon père qui y avait vécu un temps, m’avait fait rêver cette ville ! D’ailleurs, quand je serai à Prague, il m’arrivera des choses…étonnantes. Il y a un lien avec cette ville. Et Calum Fraser rend tout de cette ville; sa beauté et ses vibrations.

Jean Jacques Saignes

Jean Jacques Saignes, un peintre qui est passé par de multiples phases, passant d’un post Chagallisme à ces monochromies blanches qui ne sont pas sans évoquer le fameux « tableau blanc » de « Art », la pièce de Yasmina Reza , avait son rond de serviette à l’abbaye de Beaulieu, lieu acheté par le couple de collectionneurs Pierre Braches et Geneviève Bonnefoy. Muriel Sinclair avait un faible pour ce Jean Jacques Saignes qui…on me dit à l’oreillette était un rien « péteux ».

Réginald Pavamani

Ah Réginald Pavamani ! Indien de l’Inde. Peintre talentueux d’abstractions de belle facture, de belle construction. Sensible. Un sens de la couleur ! Un homme charmant, simple, un homme de famille, qui ne goûtait pas le Big Bazar de l’art et de son petit monde cocktailisé. Il vous invitait dans son pavillon de banlieue avec sa femme et ses enfants. Il faisait une cuisine délicieuse et vous faisait un massage s’il vous trouvait tendu ou si vous aviez une migraine. Merveilleux Réginald, emporté fort jeune par un cancer digestif très méchant. Un bel artiste et un honnête homme.

Jean William Hanoteau

Hanoteau est un des premiers peintres que nous avons aimé, Guy et moi, au moment de notre rencontre, lors de nos premières promenades artistiques communes. À l’époque, je travaillais Faubourg Saint Honoré. Guy passait me chercher et nous descendions la longue rue, jusqu’à, à deux pas de l’Élysée, la Librairie Lardanchet. Au rez-de-chaussée, nous compulsions les superbes livres d’art, les éditions uniques et exceptionnelles. Et à l’étage, visitions les expositions tournantes. Hanoteau y était souvent invité et nous aimions ses belles aquarelles figuratives et fines, souvent surlignées à l’encre de chine avec grâce. Ces paysages invitaient à la promenade et avaient un côté « narratif » que j’ai toujours aimé à trouver dans la peinture.

Yves Ullens

Yves Ullens fut de multiples expositions à la galerie d’Alexia à Londres, dans Dover Street. Un peintre abstrait bien coté, sûr, avec un style, une patte très cohérente. Rien de révolutionnaire dans son travail. Mais du bel ouvrage. Technique avec un grand sens de la couleur et cette fluidité, cette « liquidité » rêveuse.

Lesley Schiff

Lesley Schiff est américaine. Bourrée de références académiques en matière d’études artistiques. Très exposée, très cotée. Son mode d’expression privilégié est tout un système de reprographie avec des imprimantes laser aux palettes de couleurs gigantesques. Ce qui fait dire à ses détracteurs qu’elle peint avec une photocopieuse. Ce qui est un rien caricatural. Il est de très belles oeuvres dans son travail. Empreintes d’originalité. Lesley est une grande amie d’Alexia et avait sa brosse à dents chez elle. Bon, elle avait  – je ne sais pas si elle a évolué  – un petit côté « artiste chieuse » qu’elle cultivait avec désinvolture.

À suivre…

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